« autoportrait 2002 » est une vidéo réalisée suivant
le même principe technique que « 15 jours ». Cette fois la prise de
clichés quotidiens s’étale sur une période de trois mois, cette vidéo comprend
92 autoportraits photographiques qui sont les images de base, toutes les autres
images (plus de 2300) sont le résultat de morphings entre chaque image de base.
Les morphings entre chaque image s’effectuent d’abord lentement puis accélèrent
progressivement en s’éclaircissant dans la dernière partie de la vidéo au fur
à mesure de son déroulement pour finir par un écran blanc. Si la technique de
production par morphing de cette vidéo est la même que celle utilisée dans « 15
jours », l’effet produit est revanche très différent. La durée et la non-monotonie
du défilement de la vidéo modifie la perception du visage. Dans « 15 jours »,
on ne percevait pas de modification du visage, l’espace de temps entre la première
et la dernière image étant trop court. Dans « autoportrait 2002 », il
s’écoule trois mois entre la première et la dernière photographie, et bien qu’un
visage ne change pas véritablement en si peu de temps, on peut toutefois remarquer
la modification de la taille de ma barbe qui fournit une indication de l’écoulement
du temps. Progressivement ma barbe pousse jusqu’à une certaine image où je me
la suis taillée et où le morphing semble faire un brusque retour en arrière du
temps pour le laisser enfin reprendre sa course. Au fur et à mesure du défilement
de la vidéo, celle-ci s’accélère et s’éclaircit simultanément comme pour se confondre
avec le présent. Tout comme « 15 jours », « autoportrait 2002 »
ne se veut pas comme étant une vidéo finie, ce ne sont que des fragments qui peuvent
se suffirent à eux-mêmes mais se complètent par accumulations de séquences vidéos
réalisées avec la reprise du même mode de production, à savoir une photographie par
jour avec une série d’images produites par interpolation entre deux photographies
grâce à la technique du morphing. Cette technique du morphing, en inventant des
images par une manipulation des points de l’image, en calculant l’emplacement
des points intermédiaires, ajoute un lien fictionnel entre chaque photographie.
Le morphing traduit qui aurait pu être entre ce qui ce qui a été. La reprise de
séquences ou le prolongement d’une séquence par ajout d’une autre séquence permet
la réactualisation du portrait qui se « forme » par cet accumulation
de fragment sans jamais être fini. On peut comparer chaque fragment à un segment
de droite limité par un début et une fin, et le portrait à une droite infinie.